Un gorille dans les chiqueros
C’est un dessin de Chaval (1915-1968), réjouissant et absurde. Des banderilleros et des matadors épouvantés prennent la fuite, coudes au corps : ce n’est pas un taureau de combat qui est sorti du toril, mais un impressionnant gorille.
Aux échecs, la même épouvante saisit parfois le joueur émotif, quand l’adversaire fait jaillir sur l’échiquier un monstre bizarre inconnu au bataillon des ouvertures.
Que dire de la pseudo-Rossolimo ?
À la fin du règne de Louis XIV, un botaniste au nom prédestiné, M. Frézier, croisa avec les fraises de Virginie du potager de Versailles, minuscules mais délicieuses, quelques grosses fraises chiliennes insipides. Il en résulta un hybride énorme et succulent, dont nous mangeons aujourd’hui les descendants.
Wesley a réussi une hybridation à la Frézier, en croisant la Rossolimo à l’Attaque Grand Prix, écrasant ainsi dans l’œuf les Siciliennes adverses. Et ça marche ! C’est la pseudo-Rossolimo, qui transforme le venin de la Najdorf en lait en poudre.
En croisant un peu de Sicilienne et un peu d’Ouest-Indienne, j’ai essayé moi aussi une hybridation-miracle face à la pseudo-Rossolimo. Mais cette tentative de croisement fécond devait moins à Frézier qu’à Pierre Dac, qui affirmait qu’en mariant un loup avec un phoque, on obtenait un loup-phoque. Ce fut un échec.
– Mais non, a dit Wesley, toujours positif. Elle se joue, ta position !
– Bof, j’ai dit.
– Elle se joue, je peux faire un cours là-dessus, a-t-il dit, du ton qu’emploie Philippe de Nevers quand il propose au Chevalier de Lagardère : « Si vous avez cinq minutes, je vous enseigne les secrets de ma botte ». OK, Wesley.
À bientôt, les futurs Carlsen ! Mangez des pâtes !
Jean-Michel Labourdique