Le Requin du Groenland est un squale gigantesque et méconnu. Il hante les eaux de l’Arctique. Il est incapable de mouvements rapides. Ne pouvant poursuivre des proies, il se contente de se promener dans les abysses et de croquer les charognes qui tombent de la surface.

Donc, le Requin du Groenland n’est pas un tacticien. Il joue positionnel. J’ai pensé à lui en jouant l’Anglaise à la ronde 1, contre l’équipe de Pessac, un Fou en fianchetto pour croquer tout ce qui tomberait du centre.

Match nul ! Comme Lennie, à ma gauche, victime du piège du Pat ! Par contre, Leo a fait fructifier son attaque Trompovski, et Fabrice Calvo a su occuper le centre avant son adversaire. Victoire !

À la ronde 2, j’ai repensé au Requin du Groenland qui, chez les vertébrés, tient le record du monde de la longévité, 500 ans. La femelle ne sort de l’enfance qu’à 150 ans, c’est à dire dès qu’elle a un peu d’expérience de la vie. C’est à peu près le délai qu’impose le Monsieur qui a écrit l’article « Défense Hollandaise » sur Wikipédia pour se hasarder à jouer la dite Défense, suicidaire pour les néophytes. Mais je n’ai pas la prudence des requins : d4? f5!!!

Ma Hollandaise, bien commencée, fut mal finie, à cause d’un Roi trop éloigné d’un pion passé. Leo et Lennie, avec les pièces noires eux aussi, ont joué les deux une Défense Française. Celle de Leo s’est fracassée sur un canon d’Alekhine. Celle de Lennie n’a pas survécu au sacrifice inutile d’un Cavalier. Fabrice, après une jolie Caro-Kann, a obtenu la nulle.

J’ai repensé au Requin du Groenland à la ronde 3. À grande profondeur, la lumière du soleil ne parvient pas, et des yeux en bon état lui sont inutiles. Les « yeux » sont donc des trous de chair morte, qui servent de pâture à des vers luminescents. Ces derniers aident le squale à fasciner des proies vivantes, de rares gourmandises pour ce charognard. C’est en quelque sorte l’équivalent aux échecs du pion empoisonné, trop attrayant pour ne pas fasciner l’adversaire. Donc, après 1.e4, j’ai pensé jouer le gambit sur une Viennoise.

Devant mon adversaire, j’ai vite oublié mes résolutions. Après ma défaite, il a gentiment énuméré mes erreurs à mi-voix, mais comme je suis un peu sourd, je n’ai absolument rien compris et je n’ai pas osé le faire répéter. À ma gauche et à ma droite, Fabrice et Lennie ont considéré que Noël n’était pas terminé et chacun à offert qui sa Dame et qui sa Tour. Leo, sur le parking, en revenant aux voitures, s’est scandalisé de l’échec de sa Trompovski. C’est pour ça que les éléphants n’ont jamais eu de médaille aux Jeux Olympiques d’Hiver, lui avons-nous répondu.

À bientôt, les futurs Carlsen ! Mangez des pâtes !

Jean-Michel Labourdique
Capitaine de l’équipe Créon 2

Coupe Jean-Claude Loubatière – Phase départementale – Dimanche 11 janvier 2025 à Gujan-Mestras