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La conjecture de Fermat

La conjecture de Fermat

Pour des nombres entiers strictement positifs x, y et z, xn + yn = zn n’a pas de solution pour des entiers n>2

La somme de deux puissances de deux nombres entiers ne peut être elle-même la puissance d’un entier, si l’exposant est supérieur à 2. Par exemple, la somme de deux carrés peut être un carré, la somme de deux cubes ne peut être un cube.

Au temps du roi Louis XIII, Pierre de Fermat, conseiller au Parlement de Toulouse, féru de maths, écrit en marge d’un livre : J’en ai trouvé une démonstration merveilleuse, mais la place me manque pour l’écrire.

Et puis, plus rien, pendant trois siècles et demi. La conjecture de Fermat devient l’énigme la plus célèbre des mathématiques des nombres, un monstre sur lequel des dizaines de profs se cassent les dents. Enfin, en 1994, un Anglais, Andrew Wiles, démontre ce qui n’était qu’une supposition. La conjecture de Fermat devient alors le grand théorème de Fermat, ou théorème de Fermat-Wiles.

Aux échecs, quand la situation sur l’échiquier est tendue comme une corde de violon, il m’arrive de faire mon Pierre de Fermat. Bon, me dis-je, si je sacrifie mon Fou sur f7, son Roi est aux abois, non ?
« Calcule ! », me souffle l’esprit de Wesley d’une voix caverneuse. Alors je calcule, et il m’arrive ce qui m’arrivait en 1974, en terminale, dans les cours de maths de Madame Bianchini : de la fumée sort de mes oreilles et mon béret basque commence à fondre sur ma tête. Quand ces symptômes arrivent, je fais comme Fermat, je renonce au théorème et je sors une conjecture :
« Bof, quand son roi sera à l’air libre, ça ne peut que mal se passer pour lui ».

Le lendemain, Wesley, ma feuille de partie en main, me dit d’un air sévère : « Mais tu avais calculé la validité de ton sacrifice, Jean-Michel ? »
Je réponds invariablement que oui, j’en ai découvert une démonstration merveilleuse, mais la place me manque pour l’écrire.

Merci du tuyau, Pierre !

A bientôt, les futurs Carlsen ! Mangez des pâtes !

Jean-Michel Labourdique
La vie du Club – Cours d’échecs du mercredi 22/01/2025


Pour en savoir plus

La conjecture de Fermat

Le grand théorème de Fermat


Mannheim, 20 juillet 1914

Mannheim, 20 juillet 1914

Au milieu de l’été 1914, Mannheim, alors ville de l’Empire Allemand, accueille l’un des plus importants tournois d’échecs de l’époque. L’élite des joueurs y participe, Réti, Bogoljubov, Alekhine, entre autres.

Le 1er août, l’Allemagne déclare la guerre à la Russie tsariste et le 3 août, à la République Française. Tous les joueurs ressortissants de pays en guerre contre le Kaiser sont jetés en forteresse, à Rastatt. Le tournoi, qu’Alekhine menait, s’interrompt à mi-parcours.

La légende affirme que, pour garder le moral, jusqu’à mi-septembre, Alekhine et Bogoljubov mèneront une interminable partie à l’aveugle en hurlant leurs coups, de cellule à cellule.

À la fin de l’été, la Croix-Rouge Internationale parvient à faire libérer quelques prisonniers. La plupart s’empresseront de tout oublier. D’autres – les vrais champions – travailleront tout au long de la guerre à faire libérer leurs camarades.

Huit de ces derniers, pour l’essentiel des Russes, resteront prisonniers jusqu’en 1917 dans un coin perdu de la Forêt-Noire. Grâce aux vertus de l’amitié et à la mansuétude des gardiens, ils transformeront ce qui aurait pu être un douloureux purgatoire en un Balcon en Forêt, et ils organiseront régulièrement, année après année, des tournois d’échecs que Bogoljubov gagnera. La paix revenue, il refusera de partir, épousera une sympathique villageoise, et terminera sa vie sur son lieu de relégation. Il faut imaginer Sisyphe heureux.

En période de tournois par équipes, je n’aurais certainement pas pensé écrire un tel article. Oui, mais voilà ! Hier mercredi, je suis allé voir Wesley entraîner les futurs Carlsen et, il faut être honnête, j’ai perturbé le cours. Quelques futurs Carlsen sont en classe de 3ème, et passeront le Brevet à la fin de l’année. Alors, en bon prof d’histoire-géo à la retraite, je n’ai pas pu me retenir de faire le malin en dissertant sur les causes de la guerre de 14.

Wesley a mis le holà à ce cours improvisé, l’Entente Cordiale a laissé la place au système de Londres, et la bataille de la Marne à la Défense Française. Il a eu raison ! Mais je lui ai affirmé qu’on ne bâillonnait pas une Presse Libre, et que je parlerai de la guerre de 14 d’une façon ou d’une autre, parce qu’Assurancetourix finissait toujours par arracher son bâillon.

Et voilà, c’est fait !

Je vous laisse découvrir la morale de ma petite anecdote, les futurs Carlsen ! Mangez des pâtes ! Et courage pour dimanche !

Jean-Michel Labourdique
La vie du Club – Cours d’échecs du mercredi 04/12/2024

Hans Fahrni – Mat en 8 coups

Hans Fahrni – Mat en 8 coups

Hans Fahrni est né le 1er octobre 1874 à Prague. Il joue de la flûte et des échecs depuis son plus jeune âge. Il a connu ses premiers succès aux échecs en Suisse. Son frère, Paul Fahrni, a d’ailleurs été Champion de Suisse des échecs, ex-aequo avec Oscar Corrodi en 1892.

Il va ensuite émigrer en Allemagne.

Après un apprentissage de photographe interrompu et une maladie, il est renvoyé de la légion étrangère. C’est alors le véritable début de sa carrière de joueur d’échecs.

En 1904, il devient champion de la Fédération Allemande des Échecs.

Hans Fahrni, premier joueur d’échecs professionnel suisse

Hans Fahrni en 1905

En 1908, il remporte ses premiers grands tournois. En 1909, Hans Fahrni gagne le tournoi de Munich, devant Savielly Tartakower, Semyon Alapin et Rudolf Spielmann.

Mais c’est en 1911 qu’il célèbre son plus grand succès en remportant le tournoi de maîtres à San Remo, devant Lowtzky, Forgacs, Kostić, Przepiórka, Gunsberg et Réti.
La même année, il établit à Munich un record du monde en affrontant plus de cent joueurs en partie simultanée.

Son meilleur score a été évalué en décembre 1906 à 2557 points Elo historiques. Il a atteint le 20e rang du classement mondial, avec un score légèrement inférieur, en janvier 1917.

Théoricien et compositeur de problèmes

Le déclenchement de la Première Guerre Mondiale ruine son existence. En 1916, Hans Fahrni est traité pour la première fois pour des troubles liés à l’anxiété et interné dans un hôpital psychiatrique. Mais il parvient tout de même à publier son premier ouvrage : La Finale aux Échecs (« Das Endspiel im Schach », Leibzig, 1917).

Parce qu’il est alors considéré comme dangereux, Hans Fahrni est expulsé d’Allemagne vers la Suisse et hospitalisé à la clinique psychiatrique de Waldau près de Berne. Après une amélioration de son état, il participe à des tournois dans toute la Suisse. Mais son état s’aggrave à nouveau en 1921. Il a des hallucinations qui le conduiront à être à nouveau interné à la clinique de Waldau.

Hans Fahrni s’occupe alors intensément d’échecs artistiques. Il occupe son temps à publier des articles sur les échecs dans les journaux ou pour des magazines spécialisés. Il est le premier compositeur suisse à réaliser plus de 150 études assez proches de positions issues de parties réelles, dont 83 avec le Néerlandais Johannes Willem Keemink*.

En mai 1922, Hans Fahrni publie le traité La Défense Alekhine (première monographie sur ce thème, « Die Aljechin-Verteidigung, eine schachtheoretische Analyse », Berne, 1922).

Il donne des leçons d’échecs en privé, et a donc un peu d’argent en poche. À la clinique de Waldau, il joue aussi régulièrement avec son médecin et affirme que le docteur ne supporte pas de perdre. Il est aussi parfois autorisé à participer à des tournois à l’étranger, comme celui de 1925 à Vienne.

Une fin de vie entre art et folie

Hans Fahrni se consacre également beaucoup à l’art, à la clinique de Waldau. À partir de 1921, il réalise de nombreux dessins qu’il signe « H. F, Maître d’échecs ».

Alors qu’il séjourne dans un hôtel à Zurich pendant un tournoi, il est remarqué par son excentricité. Il achète plusieurs kilos de sucre en morceaux, qu’il arrose avec de l’eau de Cologne et qu’il jette dans la rue. Le contenu de sa valise s’envole alors par la fenêtre de sa chambre d’hôtel, suivi des meubles.

Hans Fahrni reste violent jusqu’à la fin de sa vie et meurt le 28 mai 1939 à la clinique de Waldau, à Ostermundigen près de Berne, d’une embolie pulmonaire.

Le problème

Dans ce problème publié en 1923, les Blancs ont le trait et matent en 8 coups.

À vous de jouer !


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La solution

La solution sera publiée ici prochainement.

Si vous pensez avoir trouvé la solution, vous pouvez nous envoyer votre proposition en remplissant le formulaire ci-dessous. Nous aurons le plaisir de vous répondre.

    *) Règlement Général sur la Protection des Données (Règlement UE 2016/679 du Parlement Européen et du Conseil du 27 avril 2016). Si vous souhaitez avoir davantage d’informations au sujet du traitement de vos données personnelles et des raisons pour lesquelles nous les collectons, nous vous invitons à consulter la page Mentions légales – Politique de confidentialité.


    *) Johannes Willem Keemink

    (Pays-Bas, 22/04/1900 – 02/02/1984)
    On ne sait pas grand chose de ce compositeur qui a joué un match avec M. Euwe en 1920.
    Cependant, il a laissé des études d’échecs composées en coopération avec Hans Fahrni, qui ont été publiées dans ce livre : « Het Eindspel, Handleiding voor Schakers door Hans Fahrni & J. W. Keemink Jr. » (G. B. van Goor, Zonen Gouda, 1928).


    Sources :

    Der letzte Kontinent  (Limmat Verlag, Zürich, 1997). Sous-titre : Bericht einer Reise zwischen Kunst und Wahn

    https://en.wikipedia.org/wiki/Hans_Fahrni

    https://de.wikipedia.org/wiki/Hans_Fahrni

    https://sgriehen.ch/das-tragische-leben-von-hans-fahrni-dem-ersten-schweizer-schachprofi/


    Steffen Nielsen – Mat en 5 coups

    Steffen Nielsen – Mat en 5 coups

    Si les échecs sont un art, alors ses compositeurs sont ses meilleurs artistes.

    Steffen Slumstrup Nielsen, né en 1975, est un joueur d’échecs, compositeur et journaliste danois. Possèdant un esprit créatif de premier ordre, il s’est forgé un style unique, qu’il décrit lui-même comme hautement tactique ou visuel, s’appuyant fortement sur des thèmes particuliers.

    Il s’est sérieusement intéressé à la composition d’échecs il y a moins de dix ans. Si l’on considère le fait qu’un bon nombre de compositeurs ont des carrières couvrant trois ou quatre décennies, on peut considérer que Stesffen Nielsen est encore relativement novice dans cet art. Et pourtant, comme beaucoup de ses collègues l’attesteront volontiers, il a déjà gravi les échelons les plus élevés de son domaine.
    Il est sacré champion du monde de composition d’échecs en 2022, après avoir déjà remporté le bronze en 2018. Outre le titre mondial, Steffen Nielsen a remporté plusieurs autres prix pour la composition d’échecs, tels que le prestigieux tournoi de la Coupe du Monde FIDE 2016 et un tournoi dédié au 60ème anniversaire du Grand Maître International Jan Timman en 2011.

    Steffen Nielsen a apporté des contributions significatives dans le domaine des études d’échecs et particulièrement des finales. Il est le co-auteur du livre Endgame Labyrinths.

    Voici donc un problème composé par Steffen Nielsen.

    Le problème

    Les Blancs ont le trait et matent en 5 coups.

    À vous de jouer !


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    La solution

    Il semble évident que, pour toucher le Roi noir, les Blancs doivent exploiter la diagonale blanche a2-g8, à l’aide de leu Dame et de leur Fou.
    Mais si 1.Dd5+ Rf8, l’action du Fou blanc pour participer à l’attaque du Roi noir sur cette diagonale est maintenant impossible. Car la case d5, sur laquelle il pourrait se rendre, est déjà occupée par la Dame.

    Le premier coup est donc :

    1.De6+!

    Si le Roi noir tente de fuir par 1…Rf8, le mat est imparable après 2.Fd5. Car les Noirs n’ont aucune possibilité de se défendre contre 3.Df7#.

    La seule alternative pour les Noirs est de prendre la Dame :

    1…Rxe6

    Le coup suivant consiste alors à continuer d’extraire le Roi noir de sa cachette à l’aide du Fou :

    2.Fd5!+ Rxd5 (coup forcé)

    3.Te4!

    Le Roi noir n’a plus aucune case de fuite. Mais il n’est pas en échec et n’est donc pas obligé de prendre la Tour en e4. Mais s’il joue n’importe quel autre coup, les Blancs vont l’y obliger au tour suivant, en jouant 4.Td3+, et le mat est inévitable au cinquième coup. Par exemple :
    3… g5 4.Td3+ Rxe4 (coup forcé) 5. Cf2# (5. Td4#)
    3… Cc6 4. Td3+ Rxe4 (coup forcé) 5. Cf2#
    3… Ff8 4. Td3+ Rxe4 (coup forcé) 5. Cf2# (5. Td4#)
    3… c5 4. Td3+ Rxe4 (coup forcé) 5. Cf2#
    3… f5 4. Td3+ Rxe4 (coup forcé) 5. Cf2# (5. Td4#)

    Le Roi noir capture alors la Tour en e4 :

    3…Rxe4

    4.Td3!

    Là encore, le Roi noir n’a plus aucune case de fuite, mais n’est pas en échec. Il n’est donc pas obligé de prendre la Tour en d3. Mais qu’il joue n’importe quel autre coup ou qu’il prenne la Tour, il se fait mater :

    4…d5 (ou n’importe que autre coup) 5.Cf2#
    ou :
    4…Rxd3 5.Cf2#

    (Vous pouvez faire défiler les coups sur l’échiquier ci dessous.)


    Jeff Coackley – Mat en 4 coups

    Jeff Coackley – Mat en 4 coups

    Voici un problème proposé dans l’ouvrage Winning Chess Puzzles for Kids de Jeff Coakley.

    Jeff Coakley est un maître d’échecs canadien reconnu et l’un des meilleurs entraîneurs de son pays. Il a enseigné les échecs pendant plus de 30 ans, à Toronto, dans tout le Canada atlantique et sur Internet.
    Il est l’auteur des livres populaires Winning Chess … For Kids, éditeur du Scholar’s Mate Magazine, chroniqueur pour The Puzzling Side of Chess, et un organisateur de longue date d’événements d’échecs scolaires.

    Le problème

    Les Blancs ont le trait et matent en 4 coups.

    À vous de jouer !


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    La solution

    Pour résoudre un problème d’échecs, une bonne manière de procéder est parfois de penser « à l’envers », c’est-à-dire en partant de la position de mat final supposée, et en calculant à reculons. Ici, l’idéal serait de pouvoir placer la Dame blanche en h7 pour mater le Roi noir en h8. Mais comment y arriver ?

    Il faudrait pouvoir positionner un Cavalier sur les cases f6 ou g5 pour contrôler le case h7. Mais malheureusement ces cases semblent bien défendues.

    Une autre idée serait de placer le Fou en e4 pour contrôler la case h7, en supposant que l’on puisse évacuer les deux Cavaliers qui obstruent la diagonale. Mais les Noirs semblent pouvoir interposer sans problème le pion f en f5.

    La solution émanera d’une combinaison de ces deux idées.

    1.Cfg5 fxg5 (coup forcé pour éviter le mat avec 2.Dxh7#)
    Le pion f, possible bloqueur d’un Fou en e4 a ainsi été dévié sur la colonne g.

    Il faut maintenant aussi empêcher le pion en f7 de se rendre en f5 en jouant :
    2.Cf6 Fxf6 (coup forcé pour éviter le mat avec 3.Dxh7#)
    Le pion en f7 est maintenant bloqué par le Fou en f6 et ne pourra plus avancer.

    Après 3.Fe4, les Noirs ne peuvent jouer aucun coup utile pour éviter 4.Dxh7#.

    (Vous pouvez faire défiler les coups sur l’échiquier ci dessous.)


    Les Blancs matent

    Les Blancs matent

    Le problème

    Voici un petit problème très amusant et assez facile à résoudre.

    Les Blancs ont le trait et matent.

    À vous de jouer !


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    La solution

    Pour mater le Roi noir, qui est complètement bloqué, on s’aperçoit rapidement que la promotion du pion a7 en Dame n’est pas la bonne solution. En effet après 1.a8D les Noirs jouent 1…d3. Et ensuite, quel que soit le coup joué par les Blancs, les Noirs sont pat !

    La solution consiste donc à faire une sous-promotion pour permettre aux Noirs de jouer un coup forcé :

    1.a8C! d3
    2.Cb6 cxb6
    3.c7 b5
    4.c8C b4
    5.Cd6 exd6
    6.e7 d5
    7.e8C d4
    8.Cf6 gxf6
    9.g7 f5
    10.g8C#

    (Vous pouvez faire défiler les coups sur l’échiquier ci dessous.)